LA METEO DURANT LA BATAILLE DES ARDENNES.

Nous nous préparons à commémorer les 80 ans de la bataille des Ardennes qui s’est déroulée entre le 16 décembre 1944 et le 25 janvier 1945 (retour aux positions initiales des forces allemandes le 2 février). A cette occasion j’aimerais revenir un peu plus en détails sur les conditions météo qui sont rentrées dans la légende de cette confrontation qui sonnait comme le glas du régime nazi en Europe de l’ouest mais précipitait aussi sa chute totale sur le vieux continent. Hitler jetait parmi ses dernières forces vives afin de renverser la balance qui penchait inexorablement vers le camp allié, le carburant manquait et il visait les importants stocks de combustibles à Anvers.

Voici les raisons pour lesquelles le Führer nazi avait choisi les Ardennes comme lieu des confrontations : – Le front ennemi dans le secteur des Ardennes était très faiblement défendu.

– Une attaque dans cette zone frapperait la jonction entre les Britanniques et les Américains, ce qui entraînerait des désaccords politiques et militaires entre les Alliés.

– La distance entre la ligne de départ et un objectif stratégique solide (Anvers) n’était pas trop grande et pouvait être couverte rapidement, même par mauvais temps.

– La configuration de la région des Ardennes limitait les possibilités de manœuvre, nécessitant ainsi l’utilisation d’un nombre relativement réduit de divisions.

– Le terrain à l’est du secteur de percée était très densément boisé, offrant un camouflage contre l’observation aérienne alliée pendant la préparation de l’assaut.

Il était donc essentiel pour la direction nazie de frapper ce secteur lors de conditions météo qui empêchaient toute intervention de l’aviation alliée. La date du 10 décembre 1944 pour le début des hostilités ayant été annulée par les allemands car les stocks de carburant n’étaient pas suffisants, Hitler et ses généraux (mais surtout Hitler) avaient planifié le 16 décembre sous condition d’une météo défavorable pour le décollage de l’aviation.

Ainsi, les météorologues allemands ont vu jute, les conditions de visibilité sont mauvaises sous la brume voire le brouillard du 16 au 22 décembre 1944 sur l’Ardenne avec un flux d’origine océanique plutôt faible mais bien humide. Les températures sont proches des moyennes de saison et la neige ne fait pas encore parler d’elle. Il y avait également des périodes de pluies et de bruines, ce qui rendait le déplacement des chars et des blindés plutôt pénible à travers les terrains ardennais. Les chars allemands globalement plus lourds, étaient parfois abandonnés par Peiper et ses hommes, le calendrier du Führer devait être respecté mais les alliés réagissent bien plus vite et bien plus fortement qu’escompter par nos envahisseurs.

Il n’en reste pas moins que le début de la bataille est compliqué pour les troupes américaines qui doivent battre en retraite, l’effet de surprise joue relativement bien son rôle et il faut le temps aux alliés de se réorganiser ce qui n’est pas toujours aisé lorsque la visibilité fait défaut. D’autant plus que quelques éléments du colonel Otto Skorenzy se déguisent en GI’s et tentent des actes de sabotage. La célèbre 101ième airborne doit notamment être acheminée en véhicule, faute de moyen aérien, son arrivée à Bastogne sera déterminante.

Lorsque les conditions de brume et de brouillard se lèvent, dévoilant ponctuellement les positions allemandes, les Américains reprennent l’initiative comme ce fut le cas le 19 décembre 1944 à Noville notamment. Les chars Sherman étaient d’ailleurs toujours particulièrement mobiles.

Du 23 décembre 1944 au 27 décembre, un peu à l’image de ce qu’il va se produire cette semaine, l’anticyclonique britannique rejoint la haute pression russe et c’est un flux d’est de plus en plus sec qui se met en place. En dehors des bancs de brouillards locaux dans les vallées, les conditions de visibilité deviennent relativement bonnes et permettent à l’aviation britannique de décoller. Par exemple, un excellent temps de vol permit au 405e groupe de chasse de mener huit missions, larguant des bombes à fragmentation et au napalm à divers points le long de la rivière de la Sûre, puis mitraillant et bombardant la route à l’est de la rivière. Le 24 décembre ce sont 160 avions qui ont pris part au largage de ravitaillements côté allié et même 289 le 26 décembre. Un véritable cadeau de Noël avant l’heure.

Il a neigé assez bien sur l’est de l’Ardenne au passage d’un front froid et les ravitaillements allemands deviennent plus compliqués depuis l’Eifel, les chasse-neiges étant systématiquement bombardés. Dans ces conditions météo plus clémentes concernant la visibilité, les alliés reprennent progressivement le dessus sur l’ennemi. Certaines journées, les maxima ne dépassent pas -6/-7°C sur les hauteurs ardennaises et les sols gèlent ce qui profitent une fois de plus aux tanks américains nettement plus nombreux dans la zone.

Ensuite, pour la fin décembre et durant le mois de janvier, les conditions sont terriblement difficiles en Belgique et plus particulièrement en Ardenne. Le rapport américain fait état, par exemple, d’un blizzard en journée du 29 décembre ce qui a contraint à rendre les mouvements de troupes et de véhicules très compliqués. Les blessés pouvaient mourir en 30min à peine s’ils étaient laissés en l’état dans la neige. Lorsque les alliés ont lancé leur contre-attaque finale le 3 janvier, les conditions étaient similaires.

Ainsi, malgré le peu d’information climatique reçue à cause de la guerre par l’IRM, l’institut nous apprend tout-de-même que janvier 1945 est l’un des plus froids du siècle en Belgique, il aura été marqué par un enneigement abondant sur l’ensemble du pays suite à des descentes d’air arctique récurrentes. A Spa, l’une des rares stations ardennaises ayant pu fonctionner une partie du mois, la couche de neige atteint la hauteur remarquable de 49 cm le 28 janvier et le thermomètre y plonge jusqu’à –18,3°C le 25. A cette dernière date, on relève aussi –20,3°C à Virton, le ciel se dégage alors progressivement avec l’établissement de conditions anticycloniques. Pour Uccle, en 1945, comme en 1940 et 1963, le mois de janvier a connu un record de trente jours de gel (normale : 13,1 jours). La température minimale la plus basse y fut relevée le 26, avec –13,9°C.

Les conditions météo ont donc joué un rôle essentiel dans la bataille, mais ce dernier sursaut d’orgueil d’Hitler semblait vain quoiqu’il arrive tant le rapport de force était déséquilibré. On se souviendra, et ce petit article va en ce sens, des héros qui ont sacrifié parfois jusqu’à leur vie pour libérer notre pays de la tyrannie dans ce que notre climat peut offrir de plus terrible. On ne peut aussi oublier toutes les personnes qui avaient perdu leur logement par ces températures extrêmes, pas moins de 11 000 habitations furent détruites.

Partageons ces quelques souvenirs autour de nous et disons « Nuts » à toute forme d’occupation et d’oppression.

Article rédigé par Mika – Info Meteo

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