Je profite de la survenue du tremblement de terre de la nuit dernière pour faire un peu de séismologie belge et donner quelques explications sur la cause de cette secousse.
Le séisme du 22 mai 2015
Ce séisme est survenu dans le sud-est du Royaume-Uni et a été ressenti assez largement dans l’ouest et le centre de la Belgique. Selon l’Observatoire Royal de Belgique, ses caractéristiques sont les suivantes:Date et heure d’origine: 22 mai 2015 à 3h52m17,2s heure d’été belgeCoordonnées de l’épicentre: 51,360°N 1,270°E, à Saint-Nicholas-at-Wave (sud-est de l’Angleterre)Profondeur du foyer: 15,0 km (incertitude: +/- 5,2 km)Magnitude locale: ML = 4,1Ce tremblement de terre est survenu au nord de la région concernée par le tremblement de terre de Folkestone (ML = 4,3) le 28 avril 2007.
Quelques explications
Comme vous le savez sûrement, nos régions sont situées assez loin des grandes limites de plaques tectoniques qui sont sismiquement et/ou volcaniquement actives. Pourtant, nous héritons d’une longue et passionnante histoire géologique qui, à travers des centaines de millions d’années, permet à nos régions de se trémousser de temps à autre. La première carte jointe (source : Observatoire royal de Belgique) montre les grandes structures tectoniques de nos régions et la plupart des tremblements de terres connus. J’ai ajouté, en rond jaune, l’épicentre du tremblement de terre anglais de la nuit dernière (pour rappel survenu à 3h52 heure belge et ayant une magnitude locale ML = 4,1). Ce tremblement de terre a pris place dans une grande structure (en bleu foncé) connue sous le nom de Massif anglo-brabançon. Il s’agit d’une structure plissée et fracturée qui, par deux fois, s’est comprimée pour former une chaîne de montagnes. Il faut en effet s’imaginer que, voici 500 millions d’années, le nord de la Belgique ressemblait plutôt aux Pyrénées qu’à une plaine de basse altitude comme maintenant. L’érosion a fait son œuvre entretemps.

Néanmoins, la structure a conservé les cassures d’alors, qui constituent des faiblesses de la croûte terrestre. Sous la pression de forces tectoniques lointaine (d’une part, la poursuite de l’élargissement de l’océan Atlantique et, d’autre part, les contrecoups de la plaque Africaine), il arrive que l’une de nos failles belges casse, provoquant un tremblement de terre. Ce fut ainsi le cas voici quelques années dans la région de Court-Saint-Etienne et d’Ottignies-Louvain-la-Neuve. Durant les 200 dernières années, le massif anglo-brabançon a d’ailleurs accouché de deux séismes relativement importants : le premier en 1828 en Hesbaye (magnitude estimée à 5,5) et le second en 1938 du côté de Renaix (magnitude : 5,6). Plus loin dans le temps, un séisme d’une magnitude estimée à 6 est survenu en Mer du Nord en 1382.D’autres structures tectoniques traversent nos régions. La première court de l’Allemagne à la Manche en passant par les grandes villes wallonnes. Elle est responsable de l’activité sismique observée dans le Hainaut et la région de Liège. Dans les années soixante, la région entre Mons et Charleroi a connu plusieurs tremblements de terre d’une magnitude de 4 à 4,5. Le séisme de 1995 (magnitude 4,5) dont l’épicentre se trouvait à Le Roeulx, près de La Louvière, est par contre du ressort du massif anglo-brabançon. Liège garde en mémoire le tremblement de terre de 1983 (magnitude 5) qui avait causé énormément de dégâts dans l’ouest de l’agglomération.Enfin, la frontière entre la Belgique, les Pays-Bas et l’Allemagne est le siège de l’activité tectonique la plus « active », avec la lente fissuration de la plaque européenne en deux à ce niveau. Ces mouvements ont entre autres donné le fort séisme de Roermond de 1992, ressenti dans toute la Belgique. En 1692, le puissant tremblement de terre de Verviers (magnitude estimée à 6,5) est lié à cette activité.La deuxième carte montre l’ensemble des témoignages parvenus à l’observatoire royal de Belgique et exprime l’intensité (donc le ressenti) du tremblement de terre de la nuit dernière. L’intensité est différente de la magnitude, qui exprime la puissance dégagée par la faille en mouvement génératrice du séisme.

Tout ceci nous montre que les séismes ne sont pas si rares chez nous, bien que la plupart d’entre eux soient tellement faibles que seuls les sismomètres les détectent. Qui par exemple s’est rendu compte du tremblement de terre survenu sous Spa la semaine dernière ou encore de cette petite secousse imperceptible s’étant produite sous Ans en décembre dernier?