Pour la énième fois, certains médias n’ont pas hésité, emportés sans doute par un réflexe pavlovien, à utiliser le terme de « mini-tornade » pour caractériser la tornade avérée en Charente-Maritime et le phénomène venteux (encore non-classifié) de Hotton. Bien que la RTBF, à travers Nicolas-Xavier Ladouce, France2, à travers Philippe Verdier, et BelRTL, à travers Christian De Paepe, aient insisté sur la non-existence de ce terme et sur la différence entre une tornade et une rafale descendante, certaines contre-réflexions ont été émises. Nous aimerions ici y répondre et participer à la disparition de ce terme.
Lorsque la RTBF a utilisé le terme de mini-tornade il y a plus de 2 ans pour caractériser le phénomène venteux de Lierre le jour même du fameux arcus de Knokke le 5 août 2013, leur réponse à Belgorage (qui critiqua l’utilisation de ce terme) nous éclaira beaucoup sur la manière de procéder de trop de médias : « Bien sûr, ce terme n’a sans doute pas de valeur scientifique stricto-sensu, mais il est néanmoins très facilement compréhensible par le public large et certainement peu spécialisé auquel nous nous adressons. » Evidemment, nous nous félicitons de l’évolution qui s’est produite en 2 ans puisqu’un des responsables météo de la chaîne publique recadre les choses à ce sujet, mais il nous a été répondu sur notre page FB que « pour les victimes, peu importe le mot utilisé ».
Nous répondons qu’à chaque type de phénomène correspond une dynamique et des dégâts particuliers. Une rafale descendante ne tourbillonne pas et ne fait pas s’envoler des débris. Par conséquent, le comportement à adopter n’est pas le même qu’avec une tornade. Par exemple, aux Etats-Unis, la police et les services spécialisés indiquent bien de ne pas se réfugier sous un pont ou une bretelle d’autoroute car la force d’aspiration y est plus importante. Avec une rafale descendante, les précautions sont différentes. De ce fait, pour sauver votre vie ou limiter les dégâts, vous adoptez un comportement et des précautions différents et cela peut fortement influer sur les conséquences finales. Dès lors, lorsque les enquêteurs de terrain viennent déterminer la nature du phénomène, ils seront évidemment intéressés par les dégâts provoqués sur les habitations et la nature. En fonction des résultats de l’analyse, des leçons devront être retenues du drame pour éviter qu’il ne se reproduise dans le futur ou le limiter. Ainsi, les victimes apprendront de leur malheur. Savoir différencier les phénomènes est donc bien plus important qu’on ne le croit. Quand on différencie tornade et rafale descendante, c’est comme appeler un chat un chat, et si vous êtes d’ailleurs mordus ou griffés par un chat, ce n’est pas par un chien. Non seulement, les 2 animaux n’ont pas la même apparence, mais ils ne véhiculent pas forcément les mêmes microbes et donc ne provoquent pas les mêmes conséquences. Pour la tornade et la rafale descendante, c’est la même chose.
Plus ou moins dans le même style, on nous a répondu que pour le « bon peuple, c’est une mini-tornade ». Malheureusement, le « bon peuple » a une fichue tendance à ne plus savoir aussi écrire correctement. Et ceci n’est pas une bonne raison pour justifier de telles aberrations. Pourquoi devons-nous utiliser le préfixe « mini » pour caractériser ce qui vient de nous arriver ? Utilise-t-on ce préfixe pour un orage a 1 éclair et 1 coup de tonnerre ? Pour une averse de 1 minute ? Pour la tempête tropicale Marco en 2009 qui mesura 15 kilomètres de rayon ? Pour un séisme de 2.0 sur l’échelle de Richter ? Pour une éruption d’1 heure ? Il semblerait que la « mini-tornade » soit l’exception. Il faudrait alors effectuer des recherches historiques pour aller aux sources de cette aberration afin d’en chercher les causes premières. Aujourd’hui, cela est accepté par la presse car « elle s’adresse à un public peu spécialisé ». Cela est particulièrement dommageable car la presse, tel un professeur, devrait informer et éduquer la population, au lieu de déformer les propos et les définitions. Pourtant, les cônes belges et français, bien que moins impressionnants que ceux rencontrés aux Etats-Unis, obéissent aux mêmes lois de la physique. Quelqu’un me disait un jour « qu’il était stupéfait d’apprendre que les tornades existaient en Belgique ». Cela explique peut-être pourquoi on s’évertue à utiliser le terme de « mini-tornade », en pensant que les vraies tornades n’existent qu’aux Etats-Unis. L’image ci-jointe, de la tornade de Braine-le-Comte, prouve le contraire.

Dans une société où faire montre d’un peu de raisonnement et de rigueur semble de plus en plus passer pour de l’arrogance intellectuelle et scientifique, ces quelques réflexions nous feront passer aux yeux de certains pour des utopistes, des idéalistes, voire … des emmerdeurs. Si nous tenons à cette précision, c’est parce que nous pensons que parler correctement aide notre société. Quelqu’un disait que « Quand on écrit mal, on pense mal, et quand on pense mal, on vit mal ». Albert Camus a ajouté : « Mal nommer les choses contribue au malheur du monde ». Ici, utiliser le terme de « mini-tornade » ou confondre « tornade » et « rafale descendante » contribuent à de mauvais comportements et aux malheurs des personnes. C’est pourquoi nous tenons à cette précision.