Lorsque le sensationnalisme des médias a encore frappé le 1er août 2013 en annonçant « la journée la plus chaude du siècle » pour le jour suivant, il est évident que nous avons été sur la brèche pour contre-informer et rappeler que les températures de 2003 avaient dépassé les 38° et étaient donc plus élevées que celles qui allaient être enregistrées ce 2 août 2013. Nous n’étions pourtant que 10 ans en arrière, mais le plus incroyable, c’est que les médias avaient complètement oublié cette journée du 20 août 2009, seulement 4 ans en arrière, alors qu’elle apparaît comme LE moment où le record de chaleur absolu aurait pu être battu en Belgique. Rétro-actes …
En cet été 2009, le temps est très correct : la moyenne de juillet est 1.6° au-dessus des normales. Les hautes pressions sont assez présentes, dans des positions autorisant régulièrement des flux de Sud à Ouest, donc doux voire chauds. 5 jours avant ce 20 août, des réserves d’air chauds commencent à se constituer sur le Sud du continent :
A 262m d’altitude, une couche d’air très chaud est observée avec 29.2° mesurés. Au niveau 850Hpa, à plus de 1500m, les 20° sont presque atteints. Il faut monter à 4000m pour trouver le point de congélation ! Notons que cela ne constitue pas un record car le 19 août 2012 enregistra une température de 31.8° à 2h du matin à la même altitude et il fallut monter à 4400m pour geler ! Dès lors, un élément important va permettre à ce 20 août 2009 de grimper plus haut que le 19 août 2012 : l’apparition de nuages durant la nuit.
L’image satellite de 5h15, en fin de nuit, montre l’arrivée de nuages par le Sud. Ceux-ci vont limiter la baisse de la température. A Beauvechain, le flux continu d’air chaud en provenance du Sud et ces nuages font évoluer la température ainsi : 23.8° à 2h, 24.4° à 3h (en augmentation !), 24.3° à 4h, 23.9° à 5h, et finalement 23.7° à 6h du matin. Pour une région rurale, nul doute qu’une telle température minimale est exceptionnelle ! Uccle, à 7h du matin (18 minutes après le lever du soleil) enregistre 24.0°. Kleine Brogel n’enregistre « que » 18.3° de température minimale à cause de son sol sablonneux. A titre de comparaison, le 19 août 2012 enregistra 16.8°, soit 1.5° de moins. C’est donc bien dans cette différence produite par la présence de nuages en fin de nuit qu’il faut trouver une explication à ces températures très élevées.
Ensuite, l’évolution de la température à Kleine Brogel durant cette journée est tout simplement exceptionnelle, et la fiche d’InfoClimat nous donne beaucoup d’indications :
D’abord, l’évolution de la températures est comparable à celle d’une fusée : elle gagne presque 10° en 2 heures, passant d’un agréable 22.8 à 9h à un étouffant 32.1° à déjà 11h. Peu après midi, on atteint les 35° ! Le 19 août 2012, les 35° ont été atteint à 13h30, soit un peu plus d’une heure plus tard. Le record de Haacht du 27 juin 1947 (38.7°) est en danger. Il ne sera cependant battu.
On peut constater sur la fiche qu’à 15h, la température atteindra 37.8° et même 38.2° vers 15h20. Cependant, une ligne de convergence pré-frontale aborde la Belgique. A l’arrière, le vent vire vers l’Ouest. Des nuages sont bien présents sur la Belgique en début d’après-midi, comme l’indique cette image satellite. Dès lors, la température est obligée de baisser assez tôt en journée. A 20h, des orages frappent l’Est du pays. La chaleur est totalement évacuée de Belgique. A 22h, il fait 18.7° à Kleine Brogel.
Rétrospectivement, puisque le 19 août avait enregistré son maximum à 18h, avec 38.2° à 15h20 le lendemain, le record de 38.7° de Haacht aurait certainement été battu si cette ligne de convergence avec des nuages présents assez tôt en journée n’était pas intervenue à ce moment-là. Il est alors probable qu’on aurait atteint les 39°. Cela montre aussi que pour avoir des températures très élevées en Belgique, il faut des conditions très particulières : un appel d’air très chaud sur au moins 2 jours dans tous les étages de l’atmosphère, une nuit avec des températures d’environ 22°, un soleil suffisamment présent au maximum de l’appel d’air chaud, une présence tardive des nuages avec donc peu d’humidité relative, et d’une manière générale peu ou pas d’éléments perturbateurs. La récurrence de températures de 37° ou plus ces dernières années montre que ces conditions sont de plus en plus souvent rencontrées et qu’il arrivera tôt ou tard où le record du 27 juin 1947 sera battu.